Comment évaluer vous les relations entre la Serbie et l’Algérie ?
Les relations entre l’Algérie et la Serbie se fondent sur l’amitié tissée entre les deux peuples durant la guerre de libération nationale menée par le peuple algérien, qui a trouvé auprès de l’ex Yougoslavie, un soutien multiforme à sa cause.
Aujourd’hui, au moment où nous célébrons le 55ème anniversaire de notre indépendance, arrachée la 5 juillet 1962, au prix de lourds sacrifices, je me dois de rendre un hommage au Président Tito et à tous les peuples de l’ex-Yougoslavie, pour le soutien et la solidarité dont ils avaient fait preuve à l’égard du combat mené par les algériens contre le colonialisme, mais également pour leur contribution à l’effort de développement que l’Algérie avait engagé dès les premières années de l’indépendance.
L’Algérie et la Serbie ont su préserver ce socle d’amitié, sur lequel nos deux pays ont construit une coopération économique dans plusieurs domaines et une concertation politique sur les questions internationales d’intérêt commun.
La visite en Algérie, en mai 2016, de Tomislav Nikolic, ancien Président de la République, la première visite en Algérie depuis l’avènement de la République de Serbie, est venue confirmer la dynamique de renforcement de cette relation décidée par les plus hautes autorités de nos deux pays.
Quel est l’état des échanges commerciaux entre les deux pays ?
Les échanges commerciaux entre nos deux pays sont actuellement en deçà de la qualité des relations politiques qui existent entre nos deux pays et du potentiel réel dont ils disposent.
Il est vrai que les changements politiques et économiques que nos deux pays ont connu dans les années 90, et les périodes de troubles qui ont marqué nos deux pays à cette époque, ont été à l’origine d’un reflux dans nos échanges, en comparaison avec la densité et la diversité qui a caractérisé les relations de l’Algérie avec l’ex-Yougoslavie.
Toutefois, on peut dire que depuis l’année 2000, nos échanges ont repris une tendance positive. Les échanges ont triplé ces trois dernières années en passant d’environ 20 millions USD en 2013 à près de 60 millions USD en 2016.
Les accords bilatéraux signés entretemps, entre les deux pays dans plusieurs domaines ont permis une reprise. Les grands projets de développement lancés par le Président de la République Abdelaziz Bouteflika ont permis à des entreprises serbes de se placer sur le marché algérien et de décrocher des contrats importants pour la réalisation de grands projets.
Quels sont d’après vous les domaines de coopération que les opérateurs économiques des deux pays devraient exploiter ?
Lorsque l’on observe la situation géographique des deux pays, leurs potentialités économiques et les politiques de développement économique respectives, on peut identifier plusieurs domaines que les opérateurs économiques des deux pays devraient exploiter. D’abord dans le domaine agricole : La Serbie dispose d’un savoir-faire dans l’agriculture intensive dont l’Algérie, engagée ces dernières années dans de vastes projets agricoles pourrait en bénéficier notamment dans le domaine des ressources en eau et dans l’organisation des circuits d’exportation. On peut également examiner la possibilité d’une coopération dans le domaine de l’énergie, où l’Algérie dispose d’une grande expertise et d’un potentiel gazier et pétrolier, ainsi qu’en matière d’énergie renouvelable. Le tourisme est également un domaine porteur. L’Algérie s’est engagé dans un vaste programme de développement de ce secteur où les opérateurs serbes sont les bienvenus. Il existe une réelle possibilité de développer le flux touristique entre les deux pays. On peut citer également d’autres secteurs tels le sport, la culture. Par ailleurs, le potentiel des deux pays offre de grandes opportunités de développer les échanges commerciaux entre les deux pays où de mettre en place des partenariats qui pourraient se projeter vers des espaces plus larges, par l’Algérie, porte méditerranéenne, ouverte sur l’Afrique et le monde arabe.
La coopération dans le domaine militaire entre l’Algérie et la Serbie, constitue une part importante dans les relations entre les deux pays, êtes vous satisfait de la dynamique de cette coopération ?
Oui, effectivement, la coopération dans le domaine militaire entre nos deux pays représente une part importante dans nos relations. Elle se poursuit de manière satisfaisante. Elle concerne aussi bien l’industrie militaire que la formation et l’échange d’expérience. Elle fait l’objet d’évaluation périodique par une commission militaire mixte qui en examine périodiquement l’état et les modalités d’exécution en vue de la renforcer et de la diversifier davantage.
Quelle importance accordez-vous aux questions du terrorisme et de sécurité dans la coopération bilatérale ?
L’Algérie qui a souffert de ce fléau et qui l’a combattu, seule, dans l’indifférence générale du monde, n’a jamais cessé de militer pour sensibiliser la communauté internationale sur le caractère criminel et transfrontalier de ce phénomène et sur la nécessité d’une mobilisation solidaire de tous les pays pour lui faire face.
L’Algérie a été pionnière dans cette action. Nous pouvons dire que nous y avons réussi puisqu’il y a, aujourd’hui, une prise de conscience internationale sur la nature criminelle du terrorisme et sur la nécessité d’une coopération internationale pour y faire face. Les attentats terroristes de ces derniers mois viennent encore confirmer la pertinence des analyses et des positions de l’Algérie.
La solidarité en matière de lutte anti-terroriste doit s’exprimer par une coopération en matière d’échanges d’informations, de mesures efficaces pour assécher ses sources de financement et pour limiter les mouvements dans l’espace, des groupes terroristes. Elle doit aussi être effective en matière de lutte contre le trafic d’armes et de drogues. Ces actions doivent s’accompagner également d’un cadrage du discours religieux et de promotion des valeurs de paix, de tolérance et de compréhension entre les différentes religions et cultures qui composent l’humanité.
C’est cette vision, et cette expertise reconnue aujourd’hui à l’Algérie en matière de lutte contre le terrorisme, que nous voulons partager avec la Serbie et avec tous les pays du monde. Dans ce cadre, des projets d’accords de coopération dans le domaine de la lutte contre le crime organisé et le terrorisme, d’autres en matière judiciaire sont en voie de finalisation et nous espérons les concrétiser dans un proche avenir.
Quel rôle joue l’Algérie dans le contexte de tension qui marque votre région par la crise en Libye, la situation dans le sahel et la persistance du foyer de tension que constitue la question du Sahara Occidental ?
L’Algérie, pays central au Maghreb, ayant des liens historiques avec les pays de son voisinage immédiat, enraciné dans son appartenance arabe et africaine, jouissant de la confiance et du respect de la communauté internationale, a toujours mobilisé sa diplomatie au service du maintien de la paix et de la stabilité de la région.
Au Mali, à la demande des autorités de ce pays, le Président Bouteflika a initié un processus (appelé le processus d’Alger ) de règlement de cette crise qui a abouti, le 25 mai 2015 , à la signature, des Accords de Paix et de Réconciliation, salué par la communauté internationale dans son ensemble.
En Libye, l’Algérie poursuit ses efforts en vue de convaincre les frères libyens à adhérer à une démarche de règlement de la crise par la voie du dialogue entre toutes les parties qui acceptent les principes d’un règlement pacifique, le rejet de la violence le respect de l’intégrité territoriale de la Libye et le refus de l’intervention étrangère.
Quelle est votre évaluation de la situation en Syrie et au Moyen-Orient et de ses conséquences géopolitiques ?
Comme je viens de vous le dire, l’Algérie plaide toujours pour un règlement pacifique des crises par la négociation et le dialogue inclusif entre tous les protagonistes sans interférence étrangère. C’est la position adoptée par l’Algérie dès le début de la crise en Syrie en 2011. L’Algérie a été membre du comité ministériel de la Ligue des Etats Arabes chargé de trouver une solution à la crise en Syrie, composé également du Qatar, du Soudan, de l’Egypte et de Oman.
L’Algérie n’a épargné aucun effort dans la recherche d’une solution pacifique à cette crise. Elle n’a pas cessé de prôner le dialogue, l’arrêt de la violence et la réconciliation entre tous les syriens qui doivent décider librement du destin de leur pays et la forme de ses institutions.
La pertinence de la position algérienne et la justesse de notre démarche ont été confirmées par la suite par la communauté internationale qui a tenté de promouvoir le dialogue par l’organisation des discussions de Genève.
Nous gardons l’espoir que les syriens se retrouvent autour d’une table pour trouver une solution à cette guerre qui a causé tant de victimes et de destructions.
De même que nous restons convaincus que la voie du dialogue inclusif, dans le respect de la souveraineté des Etats et des principes du droit international, est la seule voie pour le règlement des crises.
Vous êtes en Serbie depuis deux ans, pensez-vous que l’Algérien est bien connu de la part du peuple serbe ou bien reste-elle un pays encore méconnu ?
Pour répondre à cette question, je crois qu’il faut distinguer deux générations dans le peuple serbe : Il y a celle ayant vécu la période de l’ex-Yougoslavie et qui connait l’Algérie à travers la relation privilégiée que le Président Tito entretenait avec l’Algérie depuis la guerre de libération nationale. Cette génération a une grande connaissance de l’Algérie et continue de nourrir à son égard une profonde amitié et un profond respect.
La deuxième génération, notamment les plus jeunes, n’a pas la même perception. Elle a une connaissance limitée de notre pays mais elle manifeste un grand intérêt pour sa découverte, et un fort désir de le visiter. Cet intérêt nous l’avons constaté lors d’expositions ou d’activités culturelles que l’ambassade organise.
Cela se vérifie également dans la composante humaine de l’Association des amis de l’Algérie, une majorité de jeunes serbes, que je salue ici pour leur engagement en faveur du renforcement des relations entre nos deux pays.
Je saisis cette opportunité que m’offre Diplomacy and Commerce pour appeler, encore une fois, les opérateurs du domaine du tourisme et des voyages, ainsi que les responsables en charge du secteur du tourisme dans les deux pays, à exploiter ce filon et permettre à la jeunesse de nos deux pays de se rencontrer et de se connaitre. Le développement du tourisme permettra sans doute un plus grand rapprochement de nos deux peuples et une pérennisation de cette amitié, forgée il y a plus de soixante ans.
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